La première bataille de l'Artois fait référence à la première bataille d'Arras, en automne 1914.
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La première bataille d'Artois, ou deuxième bataille de l'Artois, se déroule à l'extrême Sud-Ouest du front occidental, au printemps 1915. Ces opérations militaires ont pour but initial de rompre le front de l'adversaire ; elles se déroulent, juste au Nord d'Arras, du 9 mai à juin 1915.
Ces confrontations militaires eurent lieu en même temps que la deuxième bataille d'Ypres, qui se déroula, - elle -, à l'aplomb au Nord et à 50 kilomètres de là, en Belgique.
Le plan français, dirigé par le général Foch, comporte une attaque principale menée par trois corps d'armée et ayant pour objectif les hauteurs de Vimy.
Ainsi, les cotes 140, 132 et 119.
Le lieu domine la plaine et ses terrils de charbonnage, la vue s'étend jusqu'à Douai. D'un point de vue stratégique, l'endroit offre les meilleures perspectives à l'artillerie. Foch fera renforcer son dispositif d'attaque, complexe et parfaitement aménagé depuis l'hiver 1914, par 72 pièces de gros calibre.
Tout d'abord fixée au premier mai, par le général en chef lui-même, la date de l'opération est retardée de quelques jours, en vue de parfaire la préparation en terme de logistique, de reconnaissance du territoire ennemi et de moral des hommes : le tout ayant été pensé (selon les stratèges de l'époque), dans les moindres détails, pour que tout un chacun ait une confiance absolue dans le succès de l'opération.
Le 33e corps d'armée allemand se trouve quant à lui sur plusieurs positions différentes. La première, éloignée de 100 à 400 mètres des tranchées françaises ; une autre, plus en profondeur, à 100 mètres en recul de la première. De nombreux boyaux de communication relient en outre une suite de redoutes entre le bois de Berthonval et La Targette, dit Ouvrages blancs.
Au Nord, Carency et le bois 125, organisés en points d'appui extrêmement puissants, forment, en ces positions-là, un excellent dédale d'appuis feu, sur le territoire occupé par les Teutons.
La deuxième position germanique est quant à elle également dotée de nombreux organes de flanquement qui s'étendent en suivant la route de Béthune.
La troisième et dernière défense appuie la position du chemin creux de Neuville-Saint-Vaast à Souchez.
Le déclenchement de l'attaque est finalement fixé le 7 mai, sur proposition du général Foch, en coordination avec le maréchal French, commandant en chef des armées britanniques. Ainsi, trois divisions françaises seront maintenues à la gauche des forces anglaises, les reliant ainsi à l'armée belge dans la région d'Ypres, où l'ennemi, depuis l'attaque d'avril, n'a cessé de se montrer fortement actif.
Dès le 4 mai, la préparation d'artillerie commence avec des décharges provenant des 6e, 8e, 12e et 20e régiments d’artillerie. Elle comprend une série de tirs à l'artillerie lourde s'étendant dans le temps sur plusieurs jours et ayant pour but de démolir les points fortifiés, ainsi que les organes de flanquement ennemis.
Dans un second temps, une préparation d'artillerie lourde et d'artillerie de campagne combinées auront pour objet de neutraliser les défenses "accessoires" ainsi que les recoins du territoire ennemi susceptibles d'abriter des réserves.
Enfin, un dispositif, constitué de pièces d'artillerie de tranchée, est chargé de la destruction des positions ennemies à proximité des lignes de front alliées et qui ne peuvent être couvertes, par prudence pour les lignes alliées, par l'action de l'artillerie lourde.
Les médiocres conditions météorologiques des 6 et 7 mai feront en sorte que l'attaque soit reportée en date du 9 mai...
Dans la soirée du 8, toutes les divisions de cavalerie disponibles sont en alerte et se tiennent fin prêtes à se porter dans la zone de la 10e armée.
Le 9 au matin, toutes les forces disponibles, qu'il est possible de prélever sur les autres armées, sont rapprochées de la bataille. Ainsi, le 3e corps d'armée, la 55e division d'infanterie et le corps de cavalerie Conneau, qui se concentre dans la région d'Amiens, sont prêts à marcher vers le Nord. La 8e division de cavalerie, qui débarque vers Hesdin, se tient également en arrière de la 10e armée, auquel cas...
Pour sa part, le général Joffre se déplace à Doullens, où il installe son poste de commandement, à proximité des troupes positionnées en réserve.
Le dispositif général fait donc appel à une conjonction de moyens importants au service de la 10e armée.
La rapidité de l'exécution de la manoeuvre sera primordiale.
Claude Parron, soldat du 26e RI, qui survivra à la guerre, écrit dans son journal :
"C’est alors, dans cette attente que nous restions jusqu'à la nuit du 8 au 9 mai, puis dans cette nuit comme on nous en avait un peu averti le soir on nous réveilla à 1 heure du matin pour partir immédiatement. On allait attaquer, on partit donc de Mareuil vers 1 heure du matin, on passa dans les boyaux et on arrivera vers 4 heures dans nos secondes lignes, puis arrivés-là on nous expliqua que notre rôle était de partir dans l’attaque sur la direction de Thélus qui était aux Boches, à environ 2 kilomètres en arrière de leur 1ére ligne et on se trouvait alors entre Ecury et Neuville-St-Vaast, à environ 2 kilomètres au nord d’Arras et autant au sud du Mont St-Eloi, puis on devait prendre Thélus, mais il fallait pour cela enfoncer la 1ère ligne Boches, la seconde, puis la 3ème et surtout traverser le fameux Labyrinthe de boyaux dont les Boches en avait fait un vrai endroit fortifié.
Pour l’attaque le 1er bataillon du 26ème, avec le deuxième, formait à eux deux la 1ère ligne d’attaque et la deuxième…"
Le matin du 9...
A 4h30, les troupes d'attaque se trouvent en place.
Il fait un temps magnifique ; la veille, le soleil et le vent ont asséché la boue qui rendait la circulation difficile dans les boyaux.
A 6 heures, la préparation d'artillerie commence en force.
Les tirs semblent parfaitement ajustés ; les coups portent de plein fouet sur les ouvrages allemands ; même les défenses accessoires sont touchées.
A 10 heures, l'artillerie allonge son tir, l'attaque d'infanterie peut enfin se déclencher.
D'un seul élan, l'attaque de la division marocaine traverse toutes les lignes de tranchées ennemies. Elle est menée par le 1er régiment étranger et le 7e tirailleurs, qui se précipitent vers la cote 140 qui est atteinte par les premiers éléments vers 11 heures. C'est à ce moment-là, alors que l'ennemi semble avoir disparu que des groupes pénètrent dans Givenchy, d'autres unités poussent jusqu'à la lisière du Petit Vimy.
Dès 10h45, le commandant de la division fait appel aux éléments de la réserve du corps d'armée des 8e zouaves et 4e tirailleurs, alors que ceux-ci sont demeurés à leurs stationnements initiaux (Mont-Saint-Eloi et Acq), et à une distance de huit kilomètres des objectifs ennemis atteints avec une rapidité initialement imprévisible.
A 11h30, le général ordonne que le 8e zouaves se porte à la disposition de la division marocaine. Ainsi, deux groupes reçoivent simultanément l'ordre de se porter en direction des Ouvrages blancs. Le bataillon de zouaves retarde son entrée en ligne à 15 heures.
Sur l'entrefait, l'ennemi s'est ressaisi.
Aux abords de La Folie d'une part, et vers Souchez d'autre part, des mitrailleuses ainsi que de l'artillerie ont été déployées afin de prendre en enfilade les unités françaises.
A cette réplique, les Français, manquant de munitions pour leur artillerie, peinent à neutraliser le dispositif de défense allemand qui s'est judicieusement déployé pour parer l'attaque.
Entre 14h00 et 15h30, une série d'engagements confus et segmentés, amène le commandement à un mouvement de repli général jusqu'au chemin creux s'étendant de la lisière Sud-Est de Souchez à Neuville-Saint-Vaast.
Pour sa part, le 4e tirailleurs, dernière réserve du corps d'armée, n'est engagé que vers 18 heures, alors qu'en cette fin d'après-midi la ligne de combat s'est renforcée de manière cohérante et solide.
Durant l'attaque de la 77e division d'infanterie, menée par une brigade alpine et un groupe de chasseurs, deux lignes successives de tranchées allemandes seront franchies d'une traite.
Le 97e régiment d'infanterie pénètrera quant à lui dans le cimetière de Souchez, avec quelques groupes, pendant que des éléments avancés du 159e atteindront Givenchy.
A 10h10, le commandement général, se rendant compte de la réussite complète de l'attaque, ordonne l'avance de l'artillerie.
A 11 heures, la batterie du 22e régiment d’artillerie prend position à l'Ouest du bois de Berthonval, alors que des éléments du 159e régiment d'infanterie, qui ont pénétré dans Givenchy, sont contre-attaqués par des troupes fraîches allemandes.
C'est le moment choisi par les Français pour se replier sur les cotes 140 et 119, ensuite vers le Cabaret-Rouge. Pour sa part, le 97e régiment d'infanterie est soumis à un violent bombardement, ce pourquoi il se retire vers la route Souchez-Carency, où la 70e division les y rejoint.
Ainsi donc, durant cette première journée du 9 mai, le 33e corps d'armée a atteint efficacement les objectifs qui lui avaient été assignés de conquérir. Dans la foulée, il a réussi à enlever deux batteries ennemies, plusieurs dizaines de mitrailleuses ; en outre, il est parvenu à faire 1.500 prisonniers, en ce compris un officier supérieur (colonel) et de nombreux autres officiers.
Epuisés et disloqués, en raison d'une course ou d'une marche rapide, selon le cas, les Français se trouvent dans l'impossibilité de poursuivre l'attaque.
L'ennemi, quant à lui, porte hâtivement des réserves sur le front des opérations, afin de refermer les mâchoires de l'étau, que constituent ses flancs, sur les Français.
A 11h15, 350 Allemands sont également faits prisonniers, en même temps que plusieurs pièces de 77 mm sont capturées dans la zone de La Targette.
Neuville-Saint-Vaast (voir p.p.13-15 PDF ici), une localité puissamment fortifiée, d'où l'ennemi tirait sur les assaillants depuis chaque maison, chaque cave organisée en tranchée couverte, subira le même sort.
A propos des fortifications...
Toujours selon le carnet de Claude Parron, soldat au 26e RI...
"... Malgré une bonne préparation d’artillerie, la 1ère ligne Boches n’avait pas de mal et elle se trouvait au contraire criblée de mitrailleuses en face. Où mon régiment attaquait et on en comptait au moins une trentaine sur une largeur de douze cent mètres, c’est-à-dire juste la largeur où mon régiment attaquait, car c’était un des endroits que les Boches avaient le plus fortifié, parce qu’il formait pour eux un point de grande importance et avec cela le terrain allant légèrement en pente de leur côté se prêtait pour ce motif admirablement bien pour eux au tir de leurs mitrailleuses.
C’est donc justement ce qui arriva. Notre 1ère ligne partit mais à mesure qu’elle avançait les hommes tombaient étant fauchés par la mitraille puis on envoyait pendant un moment du renfort de la seconde ligne mais les hommes tombaient toujours et des sections entières étaient fauchées, cependant quelques uns arrivèrent jusqu'à une trentaine de mètres mais ils ne purent aller plus loin car ils seraient tombés avant d’arriver.
C’est alors qu’après une heure environ d’un travail si terrible et voyant qu’autant on en enverrait autant ils en tomberaient ; les Chefs donnèrent l’ordre d’arrêter l’attaque sur ce point mais ceux qui étaient en bonne santé ou blessés et qui se trouvaient entre les deux lignes furent obligés d’y rester et beaucoup de ceux-là trouvèrent la mort comme cela car aussitôt qu’ils faisaient un mouvement les Boches tiraient dessus et les achevaient ou les tuaient.
C’est ainsi qu’en une heure de temps environ ils firent de terribles ravages dans nos rangs du 1er et 2ème bataillon on comptait près de huit cents morts…"
Durant la nuit du 9 au 10, le commandant du 33e corps d'armée rapprochera de la ligne de combat toute son artillerie de campagne et les batteries lourdes dont il dispose.
Face à la division marocaine, des contre-attaques ennemies se produiront toute la nuit, alors qu'elles seront repoussées.
Vers 3h30, des zouaves et des tirailleurs, ayant ouvert un feu violent sur les Allemands, voient surgir de la nuit 275 hommes conduits par 4 officiers, qui lèvent les bras et qui se rendent à eux.
Toute la journée du 10 se déroule sous une canonnade et un feu violents.
L'ennemi fait usage intensif de ses mitrailleuses. Pour ce faire, il en a dirigé vers la cote 140, et, d'autres qui prennent, en enfilade et pour cibles, les premières lignes françaises.
Vers 16 heures, se déclenche enfin l'attaque que présupposaient les violents bombardements ennemis du matin ; mais l'assaillant est repoussé vigoureusement.
Sur le front de la 77e division, un duel d'artillerie oppose les 22e, 34e, 62e et 20e régiments d’artillerie aux Allemands, durant toute la journée du 10.
Vers 11 heures, le général Barbot, commandant la 77e division, est mortellement blessé alors qu'il se trouve à son poste de commandement.
A 20 heures, une forte contre-attaque allemande, débouchant de Souchez, est arrêtée par le feu nourri du 97e régiment d'infanterie.
Au cours de cette même journée du 10, la 7e division, poursuivant son succès, resserre son dispositif plus étroitement encore autour de Carency. Un endroit puissamment fortifié, où l'ennemi a mis à profit la nature du terrain ondulé et boisé au bénéfice de sa protection.
Carency constitue, depuis le 27 décembre 1914, un saillant menaçant qu'il est impératif de conquérir, côté allié.
Au soir du 10 mai, après des combats acharnés, les troupes françaises sont enfin établies sur la route Carency-Souchez, alors que Carency, étroitement mis sous pression sur ses côtés Sud-Ouest, commence à être menacé par l'Est.
Ses défenseurs n'arrivent plus trop à communiquer avec Ablain Saint-Nazaire et Souchez.
Le 11 mai, le 33e Corps d'armée, renforcé de la 18e division, reçoit l'ordre d'enlever les hauteurs 140 et 119.
Après une courte préparation de deux heures, effectuée par les artilleries tant lourde que de campagne, l'attaque est déclenchée à 14 heures.
Les conditions dans lesquelles se produira l'engagement sont peu favorables aux Français.
Entre la première ligne et les renforts, l'artillerie ennemie bat violemment le terrain ; les communications téléphoniques sont coupées, de nombreux agents de liaison sont tués ou blessés.
L'artillerie ne bénéficie pas d'une bonne position d'observation en raison du relief du terrain, et sa liaison avec l'infanterie n'est assurée que de manière approximative.
Malgré leur bravoure au combat, les zouaves et les tirailleurs, qui essaient de progresser, sont cloués au sol.
Épuisée par trois jours de violents combats, la division marocaine a perdu son aptitude offensive et il est à présent devenu nécessaire de la relever.
Pareillement, l'attaque de la 77e division ne parvient pas à aboutir.
Plusieurs tentatives de percées échouent.
Les tirs en enfilade des mitrailleuses et de l'artillerie occasionnent de lourdes pertes au sein des rangs français.
La 7e division continue malgré cela à progresser devant Carency.
Les unités, qui bordent la route Carency-Souchez, se portent droit en direction du Nord. Elles atteignent en quelques heures le bois à l'Est du village, et après de durs combats, s'y maintiennent malgré les efforts de l'ennemi de les y en déloger.
L'offensive improvisée du 33e Corps, du 11 mai, n'a pas réussi ; les positions ont été maintenues, mais les troupes françaises n'ont pas pu gagner du terrain.
Le 20e corps, de son côté, poursuit dans Neuville-Saint-Vaast de violents combats.
Il réussit à s'emparer du cimetière, mais ne gagne que peu de territoire à l'Est du village.
La journée du 12 mai apporte à la 7e division la récompense de sa bravoure et de son opiniâtreté.
Par deux attaques convergentes, l'une partant de l'Ouest, l'autre de l'Est, les troupes françaises encerclent les défenseurs de Carency, dont les derniers îlots de résistance tombent. Là-bas, l'ennemi aura été particulièrement acharné à défendre sa zone bordant une carrière profonde de 80 mètres et composée de casemates et d'abris-cavernes représentant une variété particulière de fort.
Un millier de saxons et bavarois, dont un colonel, y seront faits prisonniers : capturés dans les ruines.
A la nuit tombée, les troupes françaises poussent sur Ablain Saint-Nazaire dont l'ennemi a abandonné la majeure partie du territoire.
Ce même 12 mai, le 21e Corps, après une lutte sanglante et acharnée, enlève le fortin de Notre-Dame-de-Lorette, au Nord-Est de la Chapelle.
Cette puissante organisation comprend des fossés, des grilles, des abris-cavernes de 10 mètres enfoncés dans le sol et qui fut capable de paralyser toute avancée française depuis le 9 mai, jour du commencement de l'attaque sur les positions allemandes...
Le 13 mai et les jours suivants...
Les 33e et 21e corps repoussent victorieusement plusieurs contre-attaques allemandes, alors que le 21e corps de la 13e division voit son offensive bloquée à droite par le fortin de la Blanche Voie.
Au Nord du plateau de Lorette, un bombardement d'une intensité exceptionnelle arrête toute manoeuvre.
La troupe réussit, néanmoins, à gagner les pentes qui se fondent vers ce qui demeure de la sucrerie d'Ablain et arrivent à s'y maintenir.
De son côté, la 77e division d'infanterie porte ses efforts directement sur Souchez en attaquant le château de Carieul. Elle se heurte toutefois à des tranchées ennemies, organisées à l'intérieur du parc et qui lui en interdisent l'accès. Ce sera l'échec.
Malgré un beau succès initial, il n'a pas été possible d'enlever Souchez ou Neuville-Saint-Vaast des griffes allemandes. Il devient évident que l'ennemi a renforcé sa position et que son organisation s'est révélée efficace et plus solide que les Français ne l'avaient supposée.
Dès lors, le général d'Urbal revoit sa stratégie. Il décide de conquérir méthodiquement, à partir de positions de base de départ, par une nouvelle attaque la crête de Vimy, dans sa partie nord, et ensuite s'étaler progressivement vers la partie sud. Les points d'appui seront les suivants : Cabaret ; Souchez et les hauteurs au Nord. Ils se trouvent à une distance moyenne de 500 mètres du front conquis le 15 mai.
Du côté britannique, une nouvelle attaque, menée le 16 mai, sur un front couvert par trois divisions, réalise de sérieux progrès. Le 18, l'entièreté de la première ligne allemande sera ainsi enlevée sur une longueur totale de 5 kilomètres et sur une profondeur de 800 mètres.
Du côté français, les opérations de détail, pour la conquête des points d'appui qui jalonnent la base de départ fixée par le général d'Urbal, continuent jusqu'au 21 mai, sans enregistrer de progrès sensibles.
Pour l'heure, qu'en est-il donc de la situation de l'ennemi, depuis le 9 mai ?
Comme il ressort du rapport établi par le G. Q. G. allemand sur cette journée-là...
Les Allemands semblent avoir :
- mesuré immédiatement la force du coup qui leur était porté ;
- avec méthode, ils ont pris toutes les mesures pour y parer ;
- neuf divisions ont été aussitôt alertées, dont une enlevée de Douai sans chevaux, ni voitures ; toutes ont débarqué, dans la région, entre le 9 et le 18 ;
- de nouvelles lignes de défense ont remplacé celles que les Français avaient conquises et celles qui n'ont pas pu être capturées ont été doublées.
En outre, le 13 mai, l'artillerie lourde s'est vue renforcée instamment.
A partir du 18 mai, une concentration de pièces de tous calibres, à tir rapide, et dotées d'un grand nombre de munitions, qui semblaient inépuisables, tient sous un feu intense tout le front de la 10e armée.
Ainsi, alors que le 9 mai les Français dominaient l'ennemi, grâce à l'efficacité de l'artillerie, ce dernier reprit peu de temps après l'avantage... pour ne plus le perdre.
Les journées du 22 au 29 mai auront été marquées par de très violentes contre-attaques sur tout le front, particulièrement sur la cote 123, à Neuville Saint-Vaast, sur les pentes de Notre-Dame-de-Lorette et au ravin de Buval.
La vigueur des actions n'aura de commune mesure que le nombre de pertes à déplorer pour cette période et temps-là.
Le 25 mai, en vue de réduire la poche ennemie que forme le village de Souchez à l'intérieur des lignes françaises, les 9e, 21e et 23e corps exécutent une attaque concentrique qui se termine le 26 par un échec cuisant.
Du 27 mai au 2 juin, il n'y a plus guère que des actions locales à constater.
A Neuville Saint-Vaast, une attaque générale, menée sur les deux flancs du village, par la 5e division, est arrêtée par des feux d'artillerie et de mitrailleuses.
Au niveau de l'ouvrage du Labyrinthe, une partie importante des organisations allemandes sont conquises et la progression continue avec succès à coups de grenades.
A ce propos, durant trois jours, la 53e division consommera 24.000 de ces engins pendant la durée de l'opération.
Pour le village de Souchez, les 236e et 237e RI effectueront une attaque qui se révélera sans succès.
Les jours suivants, la 10e armée poursuivra la conquête des points d'appui fixés.
Malgré le terrain détrempé par la pluie, le 21e corps élargira les positions récemment conquises sur le plateau de Notre-Dame-de-Lorette.
Le 33e corps enlèvera Ablain-Saint-Nazaire et la sucrerie de Souchez. Ensuite, il investira le parc de Carieul et le village de Souchez. Enfin, la commune de Neuville Saint-Vaast, disputée maison par maison, dans une lutte rageuse et opiniâtre, tombera aux mains de la 5e division, alors que la 53e s'emparera de la quasi totalité de l'ouvrage du Labyrinthe.
L'objectif fixé comme base de départ, et établi par le général d'Urbal, se trouvera sur le point d'être intégralement conquis et la 10e Armée reprendra son offensive d'ensemble.
Les derniers préparatifs se poursuivront activement, malgré l'extrême activité de l'ennemi qui sera appuyée par son artillerie lourde.
Le 7 juin, les Français attaqueront, au Sud d’Arras, les villages d’Hébuterne et de Serre.
Le 10 juin, ils entreprendront un tir systématique de démolition sur les organisations ennemies.
L'objectif principal des manoeuvres et actions auront toujours pour seul et unique but la conquête des : crête de Vimy ; cotes 119, 140 ; la Folie ; cote 132 et "Point du Jour".
Sur un front d'environ 10 kilomètres de large seront disposés, du Nord au Sud, les : 33e corps ; 9e corps ; 2e corps, renforcés de la 53e division et par les 10e et 17e corps.
L'attaque sera flanquée à gauche par le 21e corps qui masquera Souchez par le Nord et agira sur les bois de Givenchy ; les réserves de l'armée comprendront les 55e et 153e divisions, ainsi que les 3e et 2e corps de cavalerie.
Les 13 et 14 juin, l'artillerie de Foch exécute, pendant plusieurs heures, des tirs violents, à cadence rapide, simulant les préliminaires d'une attaque.
L'ennemi est ainsi leurré et demeure dans la croyance d'un éminent assaut d'infanterie qui ne viendra pas.
Le 16 juin, les Français partent à l'attaque vers midi, en même temps que se déclenche un tir de toutes les pièces d'artillerie, en ce compris les contre-batteries.
La surprise de l'ennemi par rapport à la manoeuvre alliée confère une réduction des pertes du côté français.
Tandis que les 21e et 33° corps progressent assez rapidement, les autres corps avancent avec peine et difficulté.
En fin de journée, le 21e corps et la division marocaine ont réalisé de sérieux progrès au Nord-Ouest d'Angres, sur le plateau de Notre-Dame-de-Lorette, et au Sud-Ouest de Souchez.
Quant au 9e corps et à la gauche du 2e, de très violents tirs de barrage ont arrêté leur élan. A la droite du 20e corps, les contre-attaques de l'adversaire font perdre rapidement aux Français le terrain gagné lors du premier bond.
Le 17 juin, aucun progrès n'est à enregistrer côté français.
Extrait du carnet d’Edouard Oursel, soldat au 236e RI
"… Le 18 au petit jour nous les occupons (les premières lignes), je rencontre Christophe qui me dit qu’Oscar a été blessé. Les Allemands bombardent les tranchées et les boyaux qui y conduisaient, je suis enfoui trois fois sous de la terre, j’en suis quitte pour changer de place.
Le lieutenant FRILLIOUX commandant la compagnie est blessé d’une balle à la tête, nous allons le chercher, jamais je n’ai encore vu pareille boucherie, les corps en bouillie les membres projetés un peu partout on marche sur les cadavres, nous conduisons le lieutenant au poste de secours avec bien du mal et sous les marmites.
On s’attendait à tout moment à en recevoir une.
Nous arrivons enfin au poste de secours les marmites y tombes aussi, les Allemands cherchent les pièces lourdes qui sont à coté, nous ne sommes pas sitôt partis qu’un obus tue M. le Major SEVAUX et blesse gravement M.MALLET, nous avons encore dans cette journée un brancardier de tué et 5 de blessés.
Le soir les Allemands attaquent nos premières tranchées à coups de grenade et nous repoussent à notre point de départ du 16. Ma compagnie perd 140 hommes tués, blessés et disparus, les combats durent toute la nuit…"
Du 19 au 23 juin, les 2e, 10e et 17e Corps sont maintenus dans une situation défensive, tandis que les 21e et 33e continuent leur légère progression.
Le 21e Corps atteint, en plusieurs points, le chemin creux d'Angres à Ablain Saint-Nazaire, mais sans pouvoir le conquérir entièrement.
A partir du 25 juin, la situation se stabilise sur tout le front ; la violence des contre-attaques allemandes, la solidité de ses organisations défensives ; enfin, la supériorité de son artillerie lourde abondamment approvisionnée, ne permettent plus d'espérer des résultats en faveur des Français.
Dès lors, et dans ces conditions, le général d'Urbal décide de suspendre temporairement les opérations d'ensemble...
En termes de bilan...
Si l'offensive d'Artois, - montée avec toute la puissance que comportaient les possibilités matérielles françaises du moment -, n'avait pas atteint l'objectif final assigné, elle avait toutefois obtenu des résultats importants en terme de progression sur le terrain.
Après avoir, dans l'attaque du 9 mai, enlevé d'un bond les positions ennemies, puissamment organisées, sur un front de 6 kilomètres et une profondeur de 3 à 4 kilomètres, la 10e armée avait fourni là de sérieux efforts pendant les semaines suivantes et conquis prises de guerre et trophées. Ainsi : 7.450 prisonniers, 24 canons, 134 mitrailleuses...
Mais aussi, entre tous les corps d'armée qui rivalisèrent d'endurance, de bravoure et d'audace, le 33e se distingua, sous le commandement d'un chef qui se révélait de plus en plus impressionnant, le général Pétain.
Déjà, le 8 avril 1915, dans ce même secteur, où la situation des lignes françaises avait été très confuse au début de l'hiver 1914, le commandant du 33e corps était cité pour "... avoir pris sur l'adversaire l'ascendant moral de l'offensive, et l'avoir maintenu, par une série de coups de main habilement préparés, énergiquement conduits, judicieusement exploités...".
Particularité saisissante relative aux opérations dirigées par le général Pétain...
Le fait que dans cette région de l'Artois se déroulaient des opérations militaires majeures non loin de son pays natal. Ainsi, Cauchy-à-la-Tour, constituait un bourg dont il était possible d'apercevoir les maisons, à quelques kilomètres de là, du haut de l'observatoire de Mont-Saint-Eloi.
A la suite des brillants succès du mois de mai, le commandant en chef citera, à l'ordre de l'armée, le 33e corps lui-même, pour "... avoir, sous la conduite énergique de son chef, fait preuve, au cours de son attaque du 9 mai, d'une vigueur et d'un entrain remarquables, qui lui ont permis de gagner, d'une haleine, plus de 3 kilomètres, de prendre à l'ennemi plus de 25 mitrailleuses, 6 canons, et de faire 2.000 prisonniers".
Pour le seconder, le général Pétain avait trouvé, en la personne du général Fayolle le meilleur de ses lieutenants et commandant de sa 70e division.
Pour la période du 9 mai au 16 juin, les pertes françaises s'élevèrent à : 2.260 officiers, dont 609 tués ; 100.240 soldats, en ce compris 16.194 tués, 63.619 et plus de 20.000 disparus.
Mais aussi, pour apprécier l'importance des enjeux de la bataille...
Il est important de considérer dans le temps et dans l'espace, d'autres combats, comme ceux de Champagne durant lesquels, pendant 40 jours les Français eurent à se frotter à la formidable machinerie allemande (tactique, défensive, offensive...).
Pour la première fois, la conquête de points d'appui fortifiés tels ceux de Carency ou Ablain, que les troupes de Guillaume II considéraient comme imprenables, dévoilaient toutes leurs faiblesses, en même temps qu'elles permettaient aux Français de regagner espoir en terme moral...
La surprise de l'ennemi fut à ce point totale que le GQG allemand, qui occupait Lille, en vient même à se demander si des préparatifs de départ ne seraient guère nécessaires.
Pour parer l'attaque française, le commandement ennemi eut à devoir transférer dans la région de l'attaque, toutes les réserves disponibles, soit, au total, dix divisions, indépendamment d'une volumineuse artillerie prélevée au sein des unités du front.
Cette offensive de l'Artois permit enfin au front de l'Ouest de maintenir en place des troupes allemandes qui, sinon, auraient peut-être été dirigées vers le front russe... au moment même où l'Italie rompait son serment de neutralité pour rejoindre les forces de l'Alliance...
Texte écrit d'après une libre adaptation d'un document provenant de : http://chtimiste.com/batailles1418/1915artois1.htm
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La troisième bataille d'Artois
Par Yves Le Maner, historien (ici)
L’offensive combinée franco-britannique en Artois de septembre 1915, dirigée par le général Foch, concerne 32 km de front, tenus par la VIe Armée allemande, entre La Bassée et Arras.
Elle doit se produire de façon simultanée avec l’attaque majeure menée par l’armée française, en Champagne.
Si la préparation d’artillerie doit conserver l’ensemble de ce secteur, l’attaque d’infanterie comprendra deux axes distincts, séparés par un espace de 4 km devant Lens et Liévin, où aucune action d’envergure n’est programmée : au sud, la 10e Armée française engage 17 divisions d’infanterie (et 2 de cavalerie, pour exploiter la percée espérée) ; au nord, la 1re Armée britannique doit attaquer, avec 6 divisions d’infanterie, dans le bassin minier, entre le canal de La Bassée et le village de Loos. Les objectifs stratégiques de Joffre sont vagues mais extrêmement optimistes : la percée doit permettre à la cavalerie de se ruer, en quelques jours, jusqu’à Mons, en Belgique, distante de 80 km…
Le plan d’attaque de Joffre est extrêmement simple : il consiste d’abord à écraser les positions ennemies par quatre jours de bombardements ininterrompus, avec un final apocalyptique de quatre heures juste avant que l’infanterie sorte des tranchées. L’assaut doit être massif et continu, les réserves ayant été acheminées au plus près du front.
Le bombardement français est déclenché le 25 septembre 1915, entre Angres et Arras, quelques heures après le début de l’attaque britannique sur Loos.
L’infanterie française sort des lignes à 12h45. La poussée est lente, mais au matin du 28 septembre, les Français atteignent la cote 140, au sommet de la crête de Vimy, obligeant les Allemands à une contre-attaque massive.
Le 30 septembre, Joffre décide d’arrêter l’offensive en Champagne, dont l’échec est désormais patent. Le 11 octobre, un dernier effort des Français pour contrôler l’ensemble de la crête de Vimy est brisé.
La bataille d’Arras (avril 1917)
La "bataille d’Arras" du printemps 1917 est l’une des principales offensives engagées par l’armée britannique sur le front ouest, à l’échelle de la bataille de la Somme ou de la "3e bataille d’Ypres".
Restée aux mains des Alliés mais située à quelques kilomètres du front pendant toute la durée de la guerre, et formant un saillant dans les lignes ennemies, la ville d’Arras a été, à partir d’octobre 1914, la cible de l’artillerie allemande.
L’hôtel de ville et son beffroi, emblèmes de la cité médiévale ont été détruits et une grande partie des quartiers centraux fortement endommagés.
À partir de février 1916, Arras, qui ne conserve plus qu’une faible partie de sa population civile, devient une ville anglaise, dans laquelle l’administration est bilingue.
Les plans alliés pour 1917
À la suite de la conférence tenue à Chantilly le 16 novembre 1916, où les états-majors alliés ont décidé des grandes orientations militaires de l’année 1917, le général Nivelle, qui vient d’être nommé commandant en chef de l’armée française, et son homologue britannique, Haig, jettent les bases d’une action commune pour rompre le front allemand.
La ville d’Arras, située en zone britannique, est pressentie pour constituer la base de départ d’une offensive de diversion.
Cette action, combinée avec une attaque d’envergure dans le secteur français, devait attirer les troupes de réserve allemandes quelques jours avant le déclenchement de l’assaut français et faciliter ainsi la rupture des lignes ennemies en Champagne dans le secteur du Chemin des Dames.
Dès lors, les Britanniques préparent les plans d’attaque pour une opération qui doit être déclenchée au début d’avril 1917, le principal souci du haut commandement étant de concentrer des troupes en grand nombre sans attirer l’attention de l’adversaire. Afin d’éviter les grandes hécatombes survenues au cours des batailles de Verdun et de la Somme, l’année précédente, l’état-major britannique élabore une méthode innovante : un vaste réseau souterrain (environ 20 km), dont l’aménagement est confié aux tunneliers néo-zélandais, doit permettre aux troupes de surgir devant les premières lignes ennemies sans avoir subi de lourdes pertes en traversant le no man’s land.
Les préparatifs de l’offensive de printemps
La fin du mois de mars voit l’achèvement de ces travaux souterrains, les plus importants jamais réalisés par l’armée britannique dans ce domaine.
À la veille de la bataille d’Arras, les caves et carrières sous la ville peuvent héberger plus de 24.000 hommes, soit l’équivalent de la population civile avant le début du conflit.
Le réseau est constitué de deux artères principales : la première, située sous la route de Cambrai, est dévolue aux Écossais de la 9e division d’infanterie – qui utilisent, pour baptiser les galeries, des noms évoquant le pays natal : Carlisle, Glasgow… – et aux Anglais de la 35e division – qui honorent Manchester, Liverpool, ou Chester, villes d’où sont originaires une bonne partie des soldats constituant l’unité.
La branche des souterrains sous le quartier de Ronville devient, à compter du 12 février 1917, la sphère exclusive des Néo-Zélandais se trouve par conséquent dotée de noms de grandes villes des antipodes, comme Wellington.
Au total le réseau souterrain compte 19 km de galeries.
Pour répondre aux besoins élémentaires des hommes, des cuisines sont aménagées.
L’approvisionnement en eau est assuré par des canalisations ou des puits. L’ensemble des galeries est doté d’un éclairage électrique.
Des latrines pour officiers et hommes du rang sont installées dans chaque salle. Sans satisfaire pleinement aux règles sanitaires très strictes en usage dans l’armée anglaise pour l’installation de ses campements provisoires, les carrières souterraines d’Arras offraient en revanche, par rapport à la vie habituelle des tranchées, une grande sécurité, malgré la proximité du front, et un relatif confort aux hommes avant leur montée aux lignes.
Cependant, le principe de réalité a conduit les Britanniques à aménager, dans une carrière située sous le carrefour de la rue du Temple et de la rue de Saint-Quentin, un véritable hôpital, appelé "Thompson’s Cave" du nom de son concepteur, capable d’accueillir 700 blessés.
Il est muni de tous les services nécessaires au personnel médical, à savoir de salles d’attente – d’où l’on peut répartir au mieux les blessés – d’une salle d’opérations, de lieux de repos pour les brancardiers et de réserves, ainsi qu’une morgue.
Des panneaux indicateurs permettent un accès aisé à ces divers services. L’ensemble de la structure est également doté d’un éclairage électrique.
Si l’utilisation de ce vaste réseau souterrain demeure le point le plus original du plan de bataille, les attaquants tablent également sur une préparation d’artillerie d’une intensité exceptionnelle.
Les objectifs ont été méthodiquement reconnus au cours des nombreux survols aériens, mais aussi au cours des raids menés en terrain ennemi, et ce depuis la fin de l’année 1916.
Les plus importants de ces coups de main impliquèrent plusieurs centaines d’hommes ; leur but était de tester la capacité de résistance de l’adversaire, mais aussi de collecter le maximum d’informations sur la structure en profondeur des défenses allemandes.
À l’issue de ces opérations de reconnaissance, des maquettes de grandes dimensions avaient été confectionnées, afin de permettre aux futurs assaillants, jusqu’à l’échelon des compagnies, de se familiariser avec le terrain dans lequel ils allaient évoluer.
L’emploi d’armes nouvelles avait également été prévu : le char d’assaut, pour la seconde fois après un essai balbutiant dans la Somme, et surtout, une toute récente invention due au capitaine Livens.
Il s’agissait d’un tube propulseur, capable de projeter des bonbonnes de gaz à grande distance, qui permettait ainsi à l’utilisateur de s’affranchir des caprices du vent pour utiliser des gaz de combat.
Le 6 avril, le moral des assaillants est au beau fixe, avec l’annonce de l’entrée en guerre des États-Unis.
Z day
Le lundi 9 avril 1917, à 5h30 du matin, après un bombardement intensif de quatre jours, destiné à annihiler toute action des forces adverses, la 1ère armée britannique, constituée des quatre divisions canadiennes sous les ordres du général Horne, s’élance à l’assaut du plateau de Vimy.
La maîtrise de cette crête doit permettre à la IIIe armée du général Allenby de progresser en direction de Douai, important nœud de communications, et de libérer la région minière.
Cette armée a également comme objectif prioritaire le village de Monchy-le-Preux, situé à quelques kilomètres à l’est d’Arras, qui commande l’accès à la vallée de la Scarpe et peut constituer une entrave pour une seconde branche de l’offensive, en direction de Cambrai cette fois, autre centre vital pour le système militaire allemand.
Quant à la Ve armée du général Gough, placée au sud du dispositif offensif, elle a pour tâche principale la prise du village de Bullecourt, puissant point d’appui stratégique allemand intégré dans la ligne Hindenburg.
Les deux premiers jours de la bataille d’Arras se traduisent par de nets succès tactiques des Britanniques qui, avançant sur les deux rives de la Scarpe, progressent de plus de 5 km et s’emparent des villages de Thélus, Farbus, Saint-Laurent-Blangy, Feuchy, Athies, Fampoux, Tilloy-les-Mofflaines et Neuville-Vitasse.
La conquête de la crête de Vimy permet à l’artillerie anglaise de dominer les villages de Givenchy-en-Gohelle, Vimy, Willerval et Bailleul-Sire-Bertoult, jusqu’alors de véritables nids de canons allemands, contraignant l’ennemi à les abandonner. Le village et la colline de Monchy-le-Preux, transformés en forteresse par les Allemands, sont investis, après d’âpres combats, dans la journée du 11 avril.
Le lendemain, Wancourt et Héninel tombent à leur tour entre les mains des troupes alliées.
Cette avance rapide oblige les Allemands à un repli stratégique sur leur 2e ligne de défense.
L’arrivée d’importants renforts leur permet ensuite de lancer de vigoureuses contre-attaques, dès le 14 avril, et d’enrayer l’offensive britannique.
Ainsi, comme cela s’est déjà produit lors des offensives alliées précédentes, la brèche du premier jour, effectuée avec de faibles pertes, n’a pu être exploitée.
Dès lors, la bataille d’Arras s’enlise dans des combats locaux mais néanmoins meurtriers, devant Arleux (28-29 avril), Fresnoy (3-4 mai), Rœux (13-14 mai).
Dans le même temps que se déroulent les attaques britannique et canadienne devant Arras, l’offensive principale lancée par les Français au Chemin des Dames aboutit à un cuisant échec, qui fait vaciller l’armée toute entière.
Malgré les revers subis, le Field Marshall Haig persévère pendant plusieurs semaines à lancer des attaques devant Arras, sur une ligne Gavrelle–Rœux–Guémappe–Fontaine-les-Croisilles. Ces opérations, destinées à retenir un maximum de soldats ennemis afin de soulager les troupes françaises, visent également à constituer un nouveau front, au tracé cohérent et donc défendable.
Un bilan coûteux...
Le bilan de la bataille d’Arras semble à première vue favorable pour les Britanniques : ils ont fait 20.000 prisonniers, saisi un important stock d’armes, et enregistré des gains de terrain sensibles, permettant le recul de la zone de combat sur une profondeur d’une dizaine de kilomètres et le désenclavement de la ville d’Arras, soumise depuis octobre 1914 aux bombardements allemands.
Mais ces résultats, à caractère tactique, ont été obtenus au prix de pertes très élevées.
Un peu plus de 100.000 Britanniques ont été mis hors de combat durant les mois d’avril et mai 1917 devant Arras.
Le total des pertes, du côté allemand, est plus difficile à évaluer faute de sources fiables, mais peut être estimé à un nombre équivalent.