Les animaux ont, eux aussi, participé à la Première Guerre mondiale.
Le film de Steven Spielberg, War Horse, sorti en 2011, met en perspective le rôle joué par les chevaux lors de cette guerre.
Les émissions culturelles de la Radio allemande, Deutchlandradio Kultur - Zeitfragen, ont évoqué cette problématique, ce 2 juillet 2014, dans une émission animée par Suzanne von Schenck et Ralf Bei der Kellen.
Vous en trouverez le podcast : ici
Pour tous ceux qui ne pratiquent pas l'allemand, nous avons repris, en traduction libre, les éléments principaux évoqués dans la rubrique radiophonique.
En préparation de leur émission, Suzanne von Schenck et Ralf Bei der Kellen, les journalistes de la Radio allemande, ont rencontré plusieurs éminents spécialistes de la Première Guerre mondiale.
Gerhard Bauer, membre du Musée d'histoire militaire de Dresde (Militärhistorischen Museum Dresden) déclare qu'une des caractéristiques de ce conflit portait sur l'équipement, bien qu'en début de guerre, une autre conception ait prévalu.
Eric Baratay, professeur à l'Université de Lyon (France) explique que l'intérêt porté à la problématique des animaux, en temps de guerre, est assez récent et émane, plus particulièrement, des sociétés occidentales.
Actuellement, on se concentre plus sur la souffrances des animaux, ainsi que sur leur valeur (financière, affective et sentimentale,...).
Les historiens n'ont, que depuis 2010, emboîté le pas aux citoyens.
Il n'existe pas de données précises. Toutefois, on chiffre le nombre de chevaux impliqués dans la Grande Guerre, entre 10 à 16 millions. 8 millions d'entre eux auraient été tués pendant la durée du conflit.
Les conditions d'existence des chevaux furent difficiles durant la guerre de position, dans les tranchées.
Le froid, l'humidité, le manque d'hygiène et le peu de nourriture entraîna grand nombre de maladies.
Les épidémies, telles la gale, les maladies de peau dues aux parasites, frapèrent, faute de médicaments en suffisance.
Ainsi, les animaux étaient sujets à l'irritation, à l'énervement, à la perte de poids...
Un grand nombre d'entre eux furent abattus, simplement pour le fait qu'ils ne pouvaient plus travailler.
La cavalerie joua un rôle important, lors de la planification de la guerre.
Gerhard Bauer indique que, sur le Front Ouest, il y eut des attaques de cavalerie de type classique, en août 1914. Que celles-ci se terminèrent toujours de façon sanglante, parce que devant faire face à des armes automatiques rapides et à une infanterie bénéficiant de couverture efficace.
Sybill Ebers, directrice du Westfälischen Pferdemuseums à Munster, ajoute que, jusqu'en 1926, par tradition, une dotation était affectée de façon traditionnelle à la cavalerie (sabre, sellerie, etc.).
Les grandes familles nobles prussiennes accordaient une grande importance, précise Gerhard Bauer, à ce que leurs fils soient affectés au sein des régiments les plus prestigieux, ou encore en service dans le régiment (prussien) "garde du corps".
L'artillerie était, quant à elle, traditionnellement réservée aux membres de la bourgeoisie.
Après 1871, on constate que la Bavière se veut plus libérale et pragmatique.
En Prusse, par ailleurs, on demeura plus longtemps "archaïque" ; les grades d'officiers de cavalerie étant majoritairement réservés à la noblesse.
Rappelons que ce furent von Moltke et von Falkenhayn, deux nobles prussiens, qui prirent la décision d'entraîner l'Allemagne dans la guerre, en 1914.
Il en va de même pour von Schlieffen, l'auteur du fameux plan d'attaque.
Raison pour laquelle la cavalerie joua un rôle important en début de guerre (de mouvement).
Sven Lüken, chercheur au Deutschen Historischen Museum, à Berlin, précise que le cheval était essentiellement dévolu à la noblesse aux 12e et 13e siècles. Une manière pour elle d'exercer son autorité et son leadership sur les populations.
En 1914, cavaliers et chevaux furent rendus bien inutiles face aux armes automatiques et à l'artillerie.
Les cavaliers, équipés de leurs lances, sabres, et, s'élançant dans des cris et des hourra d'un autre temps, étaient devenus des cibles faciles.
Les chevaux, quant à eux, sentant le danger venir, devenaient peureux, voire dangereux...
Edlef Köppen, dans son ouvrage autobiographique "Heeresbericht" (en français "L'ordre du jour"), explique la manière dont les cavaliers britanniques furent abattus par l'infanterie allemande.
En raison du conflit, et de sa longueur dans le temps, certains produits permettant de soigner les chevaux finirent par manquer.
Le fourrage n'ayant que peu de valeur nutritive, on en vint à faire appel à la population civile, afin de récolter le fourrage et les céréales nécessaires à l'alimentation des chevaux de l'armée.
Sur le front de l'Est...
Là-bas, contrairement à ce qui se passa sur le Front de l'Ouest, la cavalerie joua tout son rôle, grâce au maintien d'une guerre de mouvement.
En cette zone des combats, les chevaux eurent à couvrir de longues distances.
A ce propos, Félix Bürkner, dans son livre, "Ein Reiterleben", évoque la campagne de Russie.
En avril 1915, la société Fokker développe, entre autre, un avion dont la mitrailleuse est synchronisée avec les pales de l'hélice, pour permettre de tirer efficacement "en ligne".
Le cavalier Manfred von Richthofen, qui débuta la guerre dans la cavalerie, en Belgique, opte pour l'aviation.
C'est dans cette arme qu'il devint le célèbre pilote de guerre que nous connaissons (le baron rouge).
Beaucoup de chevaux, employés comme animaux de trait, périrent, faute d'être capables de s'abriter lors des attaques aériennes et des bombardements de l'artillerie.
Des hôpitaux pour chevaux furent toutefois mis sur pied pour les animaux blessés et pouvant encore être utilisés.
Des tables d'opérations mobiles furent amenées sur le front.
Des masques à gaz, tout spécialement élaborés afin d'éviter que les bêtes ne soient empoisonnées, furent employés.
La guerre finie, beaucoup de chevaux furent amenés à l'abbatage.
En cette période, les Britanniques vendirent un grand nombre de leurs chevaux aux abbatoirs et boucheries françaises.
Cette situation généra un véritable tollé en Angleterre. L'armée fut, de ce fait, contrainte de rapatrier 60.000 chevaux...
De leur côté, des associations de protection des animaux créèrent des asiles pour certains d'entre eux, cela, tant en France qu'en Angleterre.
Certaines bêtes furent honorées...
Ragtime, un cheval anglais, le fut, pour avoir participé aux quatre années de conflit. Il rentra en Angleterre en 1924, où il fut décoré.
Il participa, ensuite, aux défilés, accompagnant les vétérans.
Mais encore et pour clore...
Durant la guerre, il est intéressant de rappeler que des chiens, porteurs de charges explosives furent sacrifiés...
Que des canaris vivant dans les tranchées, par leur mort, asphyxiés, avertissaient les soldats de la présence de gaz mortels.
La survie des escargots et des limaces attestaient, pour leur part, de l'absence de produits toxiques dans la terre des tranchées.
En 2004, la Princesse Anne d'Angleterre inaugure, à Hyde Park, le "Animals in War Memorial" dédié à tous les animaux morts pendant les guerres.
Ce monument porte la mention "They had no choice" (Ils n'avaient pas le choix) ; l'édifice rend ainsi hommage aux millions d'animaux utilisés, ayant souffert ou étant morts lors des guerres à travers le monde.
Sybill Ebers rappelle que la guerre génère des troubles dus aux chocs post traumatiques ; ces derniers sont soignés grâce à l'hippothérapie.
Les chevaux conduisent, enfin (ainsi), les soldats sur la voie de la guérison.
Document rédigé par SFP ; juillet 2014