Joseph Abadie est né le 21 mars 1883 à Pézilla-de-Conflent (ici), à l'Ouest de Perpignan, dans les Pyrénées-Orientales.
Joseph est mort à Verdun, le 27 juin 1916. Son corps n'a pas été retrouvé.
Soldat, Joseph appartenait au 14e régiment d'infanterie.
Recruté à Toulouse, il relevait de la classe 1903.
Renseignements partiels extraits de l'historique du 14e RI...
Verdun – Souville
Bois de Vaux-Chapitre
26 juin 1916 – préambule...
Le 14e Régiment d'infanterie est appelé à défendre Verdun.
C'est ainsi qu'il quitte Haudainville pour se rendre dans la région station de Fleury-Bois de Vaux-Chapitre.
La relève, comme toutes celles effectuées à Verdun, est extrêmement pénible, étant donné le bouleversement inimaginable du terrain ; le bombardement incessant des pistes et des ravins et le peu d'expérience des guides qui aiguillent souvent les unités vers de fausses directions.
Erreur bien concevable quand on songe au fait que l'aspect des lieux change, à certains endroits, plusieurs fois durant une même journée.
Malgré cela, à l'aube, les unités se trouvent en place, la gauche du régiment appuyée à la station de Fleury, station non comprise, la droite au boyau des carrières.
27 juin – action...
Ce jour-là, une attaque est projetée sur Thiaumont. Elle doit être exécutée par des troupes du Corps MANGIN, en ligne, à gauche de la division. La 261e Brigade a, quant à elle, l'ordre de profiter de l'occasion pour reprendre les ruines du village de Fleury.
Depuis le matin, de part et d'autre, une canonnade intense est engagée. Vers le milieu de l'après- midi, la brigade voisine fait parvenir la nouvelle qu'elle est arrivée à progresser dans Fleury. Il s'agit donc de ne pas perdre le contact avec elle et de gagner, aussi, du terrain, en avançant sur la gauche des Français.
Cette opération est entreprise sur-le-champ, malgré un gros barrage portant sur le Sud du village. Le tir s'intensifie de telle façon qu'on peut présager une réaction adverse.
En effet, quelques instants après, de fortes vagues allemandes se présentent sur le flanc droit des voisins, menaçant en cela de déborder Fleury par l'Est.
Afin de parer à la menace d'enveloppement de l'aile droite de la 261e Brigade, qui pendant sa progression a subi des pertes sérieuses, le commandant GHEYSENS, chef du 1er bataillon du 14e, reçoit l'ordre de contre-attaquer à son tour, immédiatement, avec une compagnie de son unité. La 3e compagnie, sous les ordres du capitaine MAUVIN, se prépare à donner l'assaut. Mais, avant qu'elle ait commencé son mouvement, le tir de l'ennemi devient violent et la menace de débordement prend un caractère de gravité tel, qu'il faut renforcer cette compagnie. La troupe se rassemble avec le plus grand calme à l'abri des talus de la route de Sainte-Fine. Le capitaine MAUVIN a organisé trois vagues, fortes, chacune, d'un peloton. Une section de mitrailleuses leur est adjointe.
Dans un ordre parfait, entraînés par ses magnifiques chefs, la 3e compagnie et un peloton de la 2e compagnie s'élancent à l'assaut. Les hommes sont pleins d'ardeur. Ils franchissent la ligne de trous d'obus, qui forment leur première ligne, et, quelques mètres plus loin vont aborder l'ennemi. Une violente fusillade oblige la première vague à s'arrêter. Mais la 2e et la 3e compagnies surgissent à leur tour. Les grenadiers lancent furieusement leurs engins. Cela permet à tout le monde de reprendre le mouvement en avant, toujours en ordre. Cependant, de leur côté, les Allemands ne cèdent rien aux Français. Ils se battent avec acharnement, à coups de fusils, de mitrailleuses, lançant leurs grenades et jouant de la baïonnette. Les braves de la 3e trouvent dans cette résistance désespérée un surcroît d'énergie. Bientôt, devant cet assaut farouche qu'ils ne peuvent parvenir à enrayer, de nombreux Allemands commencent à se replier, suivis de près, vers une partie de leur ligne. L'ardeur des Français est doublée par la difficulté même qu'ils ont eu à faire décrocher un adversaire aussi tenace et qu'ils avaient à le suivre, fuyant maintenant en désordre.
Les observateurs allemands ont vu se dessiner le mouvement de repli de leur ligne et ils n'ont pas hésité. Amis et ennemis n'ont même pas eu le temps d'entendre leur sifflement sinistre, que les 210 et les 150 tombent serrés sur les combattants, pulvérisant les Allemands en même temps que les Français. Un autre rideau de fer s'abat également, en arrière de la troisième vague. Il est impossible d'aller plus en avant. D'ailleurs, dès les premiers coups, les pertes ont été sérieuses et l'intensité du feu est tel qu'on ne peut songer qu'à rallier les survivants en arrière du barrage. Des groupes entiers ont été fauchés par un seul obus. Les débris de la compagnie MAUVIN, qui ne peut plus poursuivre sa progression, se replient vers la première ligne où ils continuent à faire face et à lutter, car les Allemands reviennent, sous la protection de leurs tirs de barrage.
Cinq officiers et deux tiers de l'effectif sont restés sur le terrain. Les Français ont également imposé de fortes pertes à l'ennemi qui est encore pris à partie par sa propre artillerie et ne bouge plus de toute la journée. L'attaque qu'il allait exécuter contre la droite de la 261e Brigade est arrêtée.
Les Français furent ainsi également forcés de revenir au point de départ, au prix d'un gros sacrifice. Du moins, la contre-attaque, si courageusement menée, atteignit-elle pleinement son but. D'une part, la droite de la brigade voisine ne fut pas enveloppée par cette troupe toute fraîche qui avait été groupée dans ce but. D'autre part, l'allant superbe, la tenue, la fougue et la vaillance de la compagnie MAUVIN impressionna probablement l'adversaire au point de lui faire retarder de plus de dix jours l'attaque qu'il projetait sur Souville.
Les Allemands n'auraient probablement pas différé cette opération, s'ils n'avaient pas reconnu qu'en face de leurs régiments d'assaut, se trouvaient d'autres soldats de taille à tenir tête aux meilleures unités.
Les journées suivantes laissèrent un peu de répit aux Français, et, quoique la situation fût toujours très délicate, on put cependant, malgré le bombardement incessant, leur laisser organiser, de nuit, quelques corvées d'eau et de ravitaillement en vivres, munitions et matériel.
Devant les Français, l'infanterie allemande semblait se recueillir. Ses coups de sonde s'étaient reportés à droite et à gauche, accompagnés, comme à l'habitude, d'une violente canonnade.
Journellement le fort de Souville, les Tourelles et les abords recevaient des obus de gros calibre, qui, en soulevant d'immenses gerbes de terre et de fumée noire, donnaient assez exactement l'impression de ce que doit être une éruption volcanique intermittente. La crête de Souville semblait vomir de la lave.
On en arrivas dans ces conditions au 9 juillet 1916...
La dernière lettre de Joseph adressée à son épouse Sophie, peu avant sa disparition, mentionne les mots suivants...
"26 juin 1916, Ma chère petite jolie. Cinq heures du soir nous partons prendre possession des lignes à 7 heures". .../... "Je m'attends à tout. Le carnage a recommencé de plus belle".../... "Embrasse jalousement le petit... Aie du courage ma petite Sophie. Adieu, mille fois Adieu".
La lettre initiale s'étant détériorée, elle sera recopiée, plus tard par le fils de Joseph (né en 1914), celui-ci ajoutera la mention suivante sur le document...
"Disparu à Verdun au Chemin des Dames, ce même jour".
Joseph et Sophie Abadie résidaient à Toulouse, 21 avenue de Lyon.
Joseph était cuisinier, Sophie ménagère.
Après la guerre, Sophie se remariera. Elle décédera en 1932, dans l'Aude, là, où elle avait vu le jour.
Remarquons que Joseph Labadie ne figure pas au nombre des caporaux et soldats repris dans la liste des braves du 14e RI morts au Champ d'Honneur (Historique du 14e RI : ici).
Les noms de Pierre et Léon Abadie y sont par ailleurs mentionnés (bas de page n° 40)...