Ce qui suit est une libre interprétation d’après des récits d’époque et un article d’Alain Fauveau ; "Le dernier combat : Vrigne-(sur-)Meuse, 10 et 11 novembre 1918", Revue historique des armées : http://rha.revues.org/index291.html.
Les pourparlers d’armistice se déroulent à Rethondes entre le maréchal Foch et les plénipotentiaires allemands, quand, au soir du 9 novembre 1918, la 163e division, commandée par le général Boichut, reçoit l’ordre de franchir la Meuse, dans la région de Dom-le-Mesnil (PDF : ici) et de Vrigne-Meuse (PDF : ici).
Cette dernière offensive, menée dans la précipitation, et, destinée à obtenir la capitulation de l’armée allemande, s’acheva, comme on le sait, le 11 novembre 1918 à 11 heures du matin.
Comment s’est déroulée cette ultime opération de Vrigne-Meuse ; pourquoi et comment, près d’une centaine de soldats français, appartenant en grande majorité au 415e R.I., commandé alors par le chef de bataillon, le colonel Charles de Menditte, tombèrent lors de ce dernier baroud d’honneur ?
L’opération avait-elle encore une raison d’être ?
Pourquoi cette action, dont fait état le dernier communiqué officiel de la Grande Guerre, est-elle restée confidentielle pendant 20 ans et demeurée aussi largement méconnue à ce jour ?
Au début du mois de novembre 1918, le rapport de force entre les deux belligérants est en faveur des Alliés.
La fin du conflit est proche ; la Bulgarie et l’Autriche ont capitulé un mois plus tôt, le 2 octobre.
Le général en chef, Ludendorff, a déclaré au gouvernement allemand que l’armée est à bout de force et qu’un armistice s’impose.
La campagne de France, au cours de laquelle les pertes humaines sont particulièrement sévères, de part et d’autre des camps rivaux qui s’affrontent, se déroule avec succès depuis la contre-offensive de juillet 1918.
Les Allemands reculent en tous lieux du front.
L’ultime opération de la guerre se déroulera entre Charleville-Mézières et Sedan, lors du franchissement de la Meuse ; manoeuvre militaire devant positionner la France de manière "favorable" visant à contraindre les Allemands à signer un armistice…
Le soir du 8 novembre, la 163e division d’infanterie atteint la Meuse entre Charleville-Mézières et Sedan.
Depuis le 29 octobre, date de son transfert à la IVe armée commandée par le général Gouraud, la division, dirigée par le général Boichut, a progressé d’une cinquantaine de kilomètres, alors que les conditions climatiques leur sont défavorables et qu’une forte résistance se fait sentir de la part des Allemands.
Depuis la traversée de l’Aisne, débordés, sur les passerelles installées par le génie divisionnaire, les trois régiments d’infanterie de la division se battent dans des conditions difficiles…
Le pont sur le ruisseau de Chagny a sauté, et, les Allemands ont réalisé un barrage afin d’inonder la vallée. Toutefois, sur les débris du pont, les pionniers français ont établi une passerelle sur laquelle les chevaux franchissent le gué avec de l’eau jusqu’à hauteur du cou. La route de Chagny (PDF : ici), à Omont est barrée, tous les 50 mètres, par des chênes ou des hêtres abattus et qui se trouvent au sol, en travers. Le chemin est entravé par un énorme "entonnoir" n’autorisant que le passage des hommes ; les véhicules ou attelages ne pouvant s’aventurer par cette voie-là… A travers bois, les Français arrivent à Omont, où un accueil chaleureux leur est réservé par la population civile. Les gens pleurent de joie face aux troupes commandées par le colonel de Menditte ; soldats du 415e régiment d’infanterie qu’on lui a assigné de diriger depuis le 26 octobre 1918.
Le 8 novembre 1918, les Français atteignent Sapogne(-et-Feuchères) ; petite localité où le commandement établit son PC.
L’objectif des Français est d’atteindre la Meuse, après des journées éprouvantes de combats dans le froid et sous la pluie. Le cours d’eau est infranchissable sans moyens du génie…
Les soldats s’installent du mieux qu’ils peuvent dans les cantonnements qui leurs sont affectés. Ce soir-là, une rumeur d’armistice, rapportée par des permissionnaires, circule au sein des unités.
Alors que la 163e division atteint la Meuse, le 8 novembre 1918, les pourparlers d’armistice entre le maréchal Foch et les plénipotentiaires allemands débutent, en un coin de la forêt de Compiègne. A cet effet, les représentants du Kaiser ont traversé les lignes françaises tenues par les 171e R.I. et 166e division, le 7 novembre 1918 au soir, à hauteur de la cote 232 (lieu dit actuel : "Mont de l’Armistice", près de Haudroy).
Après contrôle de la délégation, le capitaine Lhuillier, commandant le 1er bataillon, fait sonner un cessez-le-feu (provisoire) par le caporal-clairon Sellier, pour permettre aux plénipotentiaires de traverser les avant-postes, afin de pouvoir rejoindre la Capelle-en-Thiérache, où un train spécial les attendra pour les conduire à Rethondes.
Dans la mémoire collective, Pierre Sellier, dont le clairon est conservé au musée de l’Armée, demeure LE clairon de l’Armistice. Il n’en est rien, toutefois… Ce "cessez-le-feu" du 7 novembre 1918, à Haudroy, enlève parfois la vedette au coup de clairon porté par Octave Delalucque, du 415e R.I., le 11 novembre 1918 à 11 heures, dans la région de Vrigne-Meuse… à l’issue de la dernière tentative de sortie allemande.
Le 8 novembre au soir, ordre est donné aux Français de se positionner le long du versant sud de la Meuse ; manœuvre devant donner suite à un franchissement ultérieur du fleuve.
A 22 heures 30, le général Boichut transmet, en direction de la 163e division, des ordres visant à une remise en condition des formations, au maintien d’un contact avec l’ennemi, ainsi qu’une recherche active, au moyen de raids en reconnaissance, de points pouvant permettre le franchissement sur la Meuse…
Dans la matinée du 9, le général Boichut, escorté par quelques cavaliers de l’escadron divisionnaire, effectue une tournée d’inspection des formations qui occupent les rives de la Meuse. Au cours de son déplacement, il se rend au PC du 3e bataillon du 415e régiment d’infanterie à Feuchères (PDF : ici). Sur place, il est reçu par le lieutenant Bonneval qui commande la compagnie de mitrailleuses. Il est également interpellé par un poilu qui lui pose la question de savoir ce qu’il en est d’un possible armistice… Au sein des états-majors, on planche déjà sur les prochaines opérations à mener au-delà de la Meuse. A partir des renseignements reçus dans la journée, et qui signalent le franchissement de la Meuse à (Charleville-)Mézières, par le 11e, le général Gouraud. Ordre signé à 18 heures et portant n° 802/3 relatif aux opérations à exécuter le 10 novembre… Aux corps d’armée : "… De surveiller l’activité de l’ennemi, afin de profiter de toute occasion favorable pour franchir la rivière et s’établir solidement sur la rive droite, en se bornant à poursuivre l’ennemi, le cas échéant par des éléments légers (…) et de hâter le rétablissement des communications et la poussée en avant des moyens nécessaires à l’exécution du passage de vive force (…)." ; "Se tenir prêt à passer la rivière (au 14e C.A.) et à occuper les hauteurs au Sud-Est de Lumes (PDF : ici), dès que l’avance du 11e C.A. le lui permettra." Sachant la signature d’un armistice imminente, et, compte tenu de la fatigue de ses hommes et du manque de moyens de franchissement, le général Boichut tente, sans succès, d’obtenir des délais supplémentaires de la part de son supérieur hiérarchique.
Pour réponse, le général Marjoulet ordonne : "Il faut franchir la Meuse cette nuit ; il le faut à tout prix. L’ennemi hésite à signer l’armistice. Il se croit à l’abri derrière la Meuse. Il faut frapper son moral par un acte d’audace. Passez comme vous pourrez : au besoin sur les voitures de vos convois, mises en travers du fleuve."
Telle fut la réaction du général, alors que de son côté, et, dans son dernier message, le maréchal Foch indiquera : "L’ennemi désorganisé par nos attaques répétées, cède sur tout le front. Il importe d’entretenir et de précipiter nos actions. Je fais appel à l’énergie et à l’initiative des commandants en chef et de leurs armées, pour rendre décisifs les résultats obtenus."
Les ordres du 14e C.A. furent confirmés dans la soirée.
A 20 heures, les trois chefs de corps des régiments d’infanterie furent convoqués par le colonel Petitdemange : "On a l’ordre de passer la Meuse coûte que coûte et sur n’importe quoi. Comme par hasard, je dois passer le premier. On me donne une compagnie du génie pour faire des radeaux avec des sacs Habert. Le commandant Guillaume me promet deux radeaux capables de porter chacun quatre hommes. Ils feront quatre voyages à l’heure, soit trente-deux hommes. Ils ne peuvent commencer qu’à minuit (…). Cela me présage un joyeux passage !" (note du chef de bataillon de Menditte, à la sortie de la réunion au cours de laquelle les ordres pour l’opération improvisée furent donnés).
La nuit du 9 au 10 novembre 1918
Le colonel de Menditte est confronté à la difficulté d’avoir à faire traverser, de nuit, la Meuse à tout son régiment en l’absence de tous moyens de franchissement. Les eaux débordant de la rivière s’écoulent parmi les débris des écluses et les enchevêtrements métalliques d’un barrage dont il ne subsiste que les deux piles et des longrines (poutres) branlantes. C’est le lieutenant Bonneval qui renseigne sur les ordres donnés par le chef de bataillon à ses subordonnés du 415e R.I. dans la soirée. Ainsi : "Vers 21 heures, alors que tout le monde dort sur de la paille, je fus réveillé, ainsi que les commandants des 9e et 11e compagnies, par les agents de liaison, pour une réunion immédiate au PC du bataillon. Là, le capitaine Lebreton informe que des éléments sont convoqués, de toute urgence, au PC du régiment, situé dans la cave du bureau des PTT à Dom-le-Mesnil. En un clin d’œil, les hommes sont rassemblés dans le chemin des carrières Charlemagne menant à Dom. Pour éviter tout bruit, les chaînes d’attelage des voiturettes de mitrailleuses sont garnies de chiffons. Arrivé sur place, dans le bureau des PTT de Dom-le-Mesnil, le chef de bataillon de Menditte reçoit l’escouade composée des lieutenants Bernard (9e cie), Boyer (11e cie) et (?).
"Messieurs, c’est simple. Avant demain matin 10 novembre, avant le lever du jour, il faut - je dis bien, il faut - avoir franchi la Meuse. Le 415e R.I. à droite, le 142e R.I. à Flize et à Nouvion(-sur-Meuse). Le 53e R.I. suivra le 415e. Nous disposons de 2 groupes du 244e d’artillerie et d’une compagnie du génie, la 4/62e. Actuellement la 10e compagnie (lieutenant Meynier) est en cours de passage, dans le plus grand silence, au Nord du barrage, en vue de couvrir le passage du reste du bataillon. Dès qu’il aura franchi, il sera suivi du 1er bataillon puis du 2e bataillon. Vous recevrez de nouveaux ordres."
"Pour l’instant, une compagnie se portera sur Vrigne, une autre vers le Signal de l’Épine. La dernière se placera à gauche, en direction de Nouvion. Volontairement, l’artillerie restera silencieuse jusqu’à nouvel avis. J’insiste sur le silence. Effet de surprise. Voilà Messieurs. Le général Boichut compte sur nous. Bon courage !"
Le franchissement de la Meuse par les bataillons convoqués successivement dans la nuit ne sera pas une mince affaire.
Le colonel de Menditte relatera de la sorte ces événements de la nuit…
"Il fait une brume intense et un froid de chien, mais mes pionniers aidés par le Génie (…) ont mis deux planches sur la porte de l’écluse et ont aligné sur l’armature du barrage des planches mises bout à bout. Le Boche veille et tire de temps en temps, mais ça marche." Pendant le franchissement du bataillon Lebreton, le général Boichut viendra en personne assister à l’opération : "Il arrive vers 5 heures 30. Il est absolument enthousiasmé et très optimiste. Je le suis moins que lui, car je sais bien que le Boche ne va pas nous laisser aborder et conquérir la rive droite sans protester. En ce moment, je bénéficie de la surprise, car il fait nuit et il y a de la brume mais gare au lever du brouillard. En attendant tout passe."
Pour sa part, le lieutenant Bonneval relate également, en ces mots, la présence du général Boichut au moment du franchissement de l’écluse : "Ah, la mitraille est là ! Ça va. Visez bien, et descendez-en le plus possible." Et Bonneval de répondre : "Ave Boichut, morituri te salutant !" Rassuré sur le franchissement du 415e R.I., Boischut part ensuite pour Flize, lieu de traversée de la Meuse par le 142e R.I. Là, où le franchissement se déroule dans des conditions plus difficiles…
Au lever du jour, les sections, qui ont franchi le cours d’eau, se trouvent immobilisées dans le brouillard, au milieu des barbelés et sous le feu des mitrailleuses allemandes, entre le fleuve et la Ballastière, à l’Ouest et au Sud de Nouvion.
A 8 heures 15, seul, le 415e régiment d’infanterie a franchi la Meuse.
Les PC et les liaisons téléphoniques sont en place. Le régiment a accompli la première partie de sa mission et de Menditte peut rendre compte de la situation à l’échelon de la division.
La journée du 10 novembre 1918
Si les trois bataillons du 415e R.I. ont traversé la Meuse, la journée s’annonce toutefois particulièrement difficile pour le régiment qui est en réalité le seul à pouvoir établir une véritable tête de pont au Nord du cours d’eau.
A partir de 10 heures 30, au moment où le brouillard se lève, Dom-le-Mesnil, Flize et les passerelles sont en permanence sous le feu allemand, ce qui interdit tous mouvements propices à une arrivée de renforts ou de repli des bataillons français.
Trois groupes du 415e régiment d’infanterie, soit 700 hommes, se retrouvent en infériorité numérique pour affronter les forces allemandes qui font tout leur possible pour les anéantir ou les rejeter à l’eau. La situation est d’autant plus précaire que l’artillerie n’est pas en mesure de fournir un appui efficace, en raison de sa méconnaissance de la position exacte des unités françaises ayant traversé la Meuse ; mais aussi par le fait que des civils se trouvent à proximité des combats, dans les villages aux alentours…
Des soldats allemands ayant été capturés durant la nuit, leurs interrogatoires permettent aux Français de se faire une meilleure idée des forces qui leur font face à hauteur de la 163e division, sur la rive Nord de la Meuse.
On apprend ainsi que le camps allemand dispose d’effectifs comparables à cinq régiments, à savoir, un total de douze bataillons, qu’en outre, chaque régiment est muni de quarante-huit mitrailleuses (trente-six lourdes et douze légères), et, qu’il est appuyé par une solide batterie d’artillerie en arrière de leur dispositif.
A Nouvion et en gare de triage de Lumes, se trouvent rassemblés 1.200 wagons de marchandises en partance pour l’Allemagne. L’endroit est fortement défendu par le 357e régiment d’infanterie.
Le massif de l’Épine est, quant à lui, tenu par un régiment de grenadiers (deux bataillons), constitué par les rescapés des 1er et 2e régiments de la garde, le 4e régiment de la garde (deux bataillons), et un régiment de fusiliers de la garde, une troupe d’élite (un bataillon). Un régiment d’instruction (un bataillon) et le 116e régiment d’infanterie (trois bataillons) arriveront en renfort dans la journée du 10 novembre…
Le 10 novembre vers 10 heures 30, les unités de la 163e division sont dans une situation précaire, lorsque le brouillard se dissipe.
Les 142e R.I. et 19e R.I. étant bloqués devant Nouvion, l’ensemble des forces allemandes concentrent leurs actions et leurs moyens sur le 415e R.I. qui s’étend face à eux.
Les combats les plus ardus sont menés par la compagnie Bernard (9e compagnie), lors de la prise de l’usine de phosphate.
De leur côté, la 10e compagnie de Meynier, vers le Signal de l’Épine et la cote 249, et la compagnie Coupeau (6e cie) contiennent les Allemands dans Nouvion.
La 2e compagnie, pour sa part, se bat afin de contrôler la gare et les lisières de Vrigne-Meuse tenues par les Allemands.
La situation est d’autant plus critique que le service de renseignements a rapporté, erronément, que le 11e C.A. a franchi la Meuse à Mézières.
La 163e D.I., et, plus particulièrement le 415e R.I. se retrouvent seuls à lutter contre les régiments allemands situés au Nord de la Meuse.
Face à la situation alarmante de ses hommes, Deavant envoie un message au général Marjoulet, selon lequel la progression sur le front de la division est, pour l’instant, interrompue ; que les combats sont assez durs dans le secteur qu’elle occupe. Que les Français ont à devoir faire face à de nombreux tirs de mitrailleuses et d’artillerie.
En réponse, le général demande à être informé par rapport aux forces d’appui (flancs gauche et droit). La division semble dans l’ignorance totale sur l’action en cours…
Marjourlet requiert l’intervention de l’aviation, afin d’en savoir plus sur ce qui aurait pu avoir été détecté depuis les cieux… dans le secteur des engagements…
Après une longue préparation d’artillerie, c’est en début d’après-midi que les Allemands lancent leurs contre-attaques sur le 415e R.I. Ces derniers savent que les forces qui ont traversé la Meuse ne sont guère considérables et qu’ils disposent de suffisamment de moyens pour les repousser.
Le secteur de Nouvion à Vrigne-Meuse est sur la totalité de son territoire violemment attaqué, ce qui oblige les compagnies du 415e R.I. à se replier ou à se retrancher derrière la voie ferrée : manœuvre leur permettant d’éviter d’être isolés ou anéantis.
En raison de ces combats meurtriers de l’après-midi, la 10e compagnie du lieutenant Meynier est réduite à une trentaine d’hommes, alors que du côté allemand les pertes sont tout aussi sévères.
A Dom-le-Mesnil, le colonel de Menditte sent la situation lui échapper. La localité est constamment bombardée ; les liaisons avec les bataillons sont coupées. A court d’informations sur les combats qui se jouent, il n’est plus en mesure d’ordonner quoi que ce soit à ses artilleurs.
Dès lors, il décide de se rendre compte lui-même de la situation en bord de Meuse, cela, malgré le danger évident.
"Je ne sais comment je franchis sous les obus les prairies (Sud), sous les mitrailleuses, la passerelle et le barrage. Après avoir couru avec Bastide, je longe la Meuse pour aller voir Delalande. Un mitrailleur boche me prend à partie, et, à l’aller comme au retour, me suit avec sa machine (...). Je ne sais comment j’arrive, ni comment je reviens, mais j’ai vu et je rentre plus rassuré. La position est solide et on tiendra. Je fais venir Henry, mon dévoué petit artilleur. Je lui montre ce qu’il faut battre avec ses canons et il part lui-même diriger le feu. J’enveloppe le régiment par une cage d’obus qui dégoûte les Boches (…)."
Revenu à son PC à 15 heures, le chef de bataillon de Menditte rédige un compte rendu, pour la division, et, faisant état de la situation précaire du régiment. Pour soulager la pression sur les forces engagées, le général Boichut demande au général Marjoulet de mettre à la disposition de la division tous les moyens d’artillerie disponibles pour établir deux barrages au devant des unités. Septante deux canons de 75 mm et une quinzaine de canons lourds de 155 mm entreront alors en action pour appuyer les bataillons et permettront ainsi de briser les contre-attaques allemandes…
Dans le secteur de Nouvion, les bataillons des 142e et 19e R.I. demeurent bloqués toute la journée sur leurs positions, tenus en respect par le 357e régiment allemand solidement accroché dans le village.
Le 53e R.I., en alerte à Dom-le-Mesnil, ne peut qu’assister, impuissant, aux combats qui se déroulent sur l’autre versant de la Meuse.
A 18 heures, alors que la nuit tombe, le front se stabilise enfin dans tout le secteur. Les mitrailleuses continuent cependant à tirer, alors que les canons tonnent de façon discontinue. Profitant de l’obscurité, les Français et les Allemands récupérèrent leurs morts et leurs blessés.
Les compagnies du 415e R.I. profitent de cette accalmie relative pour se regrouper, afin d’ordonner le dispositif malmené par les attaques allemandes.
Au soir du 10 novembre, le bilan est lourd. Les pertes françaises s’élèvent à 57 tués et 133 blessés. Le 415e, à lui seul, compte 37 morts et près d’une centaine de blessés, en raison du fait qu’à trois reprises il a eu à subir les assauts allemands.
Les Français feront 52 prisonniers allemands dans la journée.
La nuit du 10 au 11 novembre 1918
A l’Est de Mézières, les Allemands ont violemment contre-attaqué les éléments qui sont arrivés à franchir la Meuse, dans la région de Donchéry.
Communiqué de presse allemand daté du 11 novembre, dans la nuit…: "Nous avons rejeté l’ennemi et nous sommes maintenus sur la rive nord."
Les Allemands n’ayant encore signé un quelconque armistice, et, la tête de pont conquise par la 163e D.I. étant particulièrement fragile, l’ordre du général Gouraud, pour la journée du 11 novembre, se limite à tenir, coûte que coûte, la tête de pont conquise le 10 novembre, et, si possible, de la renforcer.
L’ordre général des opérations n° 468 du 14e C.A., transmis à 23 heures par le général Marjoulet est conforme à cette préoccupation : "… Demain 11 novembre, la mission de la 163e D.I. reste celle définie par l’ordre d’opération no 465 du 9 novembre, et précisée dans l’ordre 466, 1h30. Le général commandant la 163e D.I. (…) conservera le contact étroit de l’ennemi et s’efforcera d’améliorer les moyens de franchissement de la Meuse (…). L’équipage du pont du C.A. a reçu l’ordre de replier d’urgence les ponts de bateaux d’Attigny et de se porter, aussitôt après avoir chargé son matériel, à Chagny-les-Omonts, où il sera à la disposition du général commandant la 163e D.I., pour jeter un pont sur la Meuse, dans la nuit du 11 au 12 novembre, si la progression réalisée se poursuit (…)."
Ce document révèle à souhait la prudence dont fait part le général Marjoulet, sachant que la 163e D.I. demeure seule sur la rive droite de la Meuse ; étant donné qu’il n’y a personne dans Sedan ou à (Charleville-)Mézières. Qu’il serait hasardeux de s’engager plus au Nord, tant que le génie n’aura pas mis en place un pont permettant de renforcer le dispositif.
A ce moment du conflit, les forces françaises avaient-elles conscience de l’optimisme régnant au sein des forces alliées, étant donné que les derniers communiqués officiels, transmis par le haut commandement, précisaient ceci en milieu d’après-midi, le 10 novembre : "Dans sa retraite, de plus en plus précipitée, l’ennemi abandonne partout un matériel considérable ; nous avons capturé notamment des canons, de nombreux véhicules de toutes sortes et des trains entiers de chemin de fer."
Des heures qui purent se révéler cruciales…
En sa qualité d’artilleur, le général Boichut compte sur les éléments de son dispositif pour protéger les régiments d’infanterie et permettre ainsi le réapprovisionnement indispensable et urgent en munitions durant la nuit. Les ordres donnés en priorité à l’artillerie sont en l’occurrence particulièrement précis : "La sécurité du front, cette nuit, repose, en grande partie, sur la précision et l’instantanéité des barrages d’artillerie (…). Le colonel commandant l’artillerie divisionnaire est chargé de veiller, en outre, de très près, à toute manifestation de l’artillerie ennemie sur nos lignes, cette manifestation étant l’indice certain d’une contre-attaque. Il fera attaquer les batteries suspectes, qui seront vraisemblablement repérables par leurs lueurs, par des tirs de contre-batterie sur zone, si possible avec gaz (…)."
Par ailleurs, l’ordre d’opération transmis à 22 heures 30 précise notamment que : "Les 415e, 142e et 19e R.I. conserveront le contact étroit de l’ennemi et poursuivront celui-ci, en cas de retraite, en direction générale du Nord-Est, dans la zone précédemment fixée (…). Le génie s’efforcera d’améliorer les voies de communication et les moyens de franchissement de la Meuse (…)", en attendant l’arrivée des moyens de franchissement destinés à la réalisation d’un pont de bateaux sur la Meuse, dans la nuit du 11 au 12 novembre.
Dans les faits, et, durant la nuit du 10 au 11 novembre, chacun demeurera sur ses positions, l’œil aux aguets et le doigt sur la détente. L’artillerie lourde tirera pendant toute la nuit sur les régions de Lumes, du Signal de l’Épine et sur les Forges de Vivie-au-Court (PDF : ici) au profit, voire à la demande des unités d’infanterie de la division. Des tirs de harcèlement et d’interdiction seront également effectués en direction des routes et sur les carrefours au Nord du secteur de la division. Depuis son PC de Dom-le-Mesnil, de Menditte, en liaison téléphonique avec ses bataillons, et, assisté des deux chefs de groupe du 244e régiment d’artillerie, mis à la disposition du 415e R.I., et, qui assuraient le déclenchement des tirs des batteries, n’a sans doute guère pris beaucoup de repos… Une grande quantité de munitions sera tirée tout au long de la nuit ; cela afin d’éviter aux compagnies au contact d’être rejetées dans la Meuse.
Quant au génie…
Celui-ci oeuvrera toute la nuit durant, afin de réparer les passerelles, ou, tendre un nouveau va-et-vient en travers de la Meuse. Ce service préparera également les radeaux nécessaires à la traversée des munitions et du ravitaillement destinés aux combattants.
Ces travaux serviront de préambules au renforcement de la tête de pont pour le franchissement de renforts et de canons nécessaires à la poursuite de l’offensive au Nord de la Meuse.
Fort malheureusement, le radeau, réalisé tant bien que mal, avec des tonneaux récupérés dans Dom-le-Mesnil, par la compagnie Cuffi, sera détruit par l’artillerie allemande à 5 heures.
Ce fait aura quelques conséquences, alors que les Français ne bénéficient toujours pas d’appui d’artillerie ou d’unités d’appoint, en bordure droite de Meuse.
La journée du 11 novembre s’annonce difficile…
La situation risque fort d’être délicate pour les bataillons du 415e R.I. retranchés entre la voie ferrée Mézières-Sedan et la Meuse ; endroit que dominent les Allemands, au Nord du cours d’eau. Là, cinq ou six cents hommes sont répartis et enterrés dans leurs trous individuels sur un front de 3 kilomètres…
La journée du 11 novembre 1918
Un message émanant du maréchal Foch et annonçant la fin de la guerre est transmis par télégraphe aux commandants en chef des différentes armées alliées le 11 novembre à 5 heures 15. Ce message dit : "Les hostilités seront arrêtées sur tout le front, à partir du 11 novembre, 11 heures (heure française). Les troupes alliées ne dépasseront pas, jusqu’à nouvel ordre, la ligne atteinte à cette date et à cette heure."
L’ordre sera retransmis par le général Boichut aux régiments de la division à 7 heures 15. Il sera également accompagné de consignes particulières relatives à la prudence. Ainsi, le colonel Petitdemange jugera utile de rajouter quelques recommandations supplémentaires, telles que : "Les hommes mettront leur mouchoir au bout de leur fusil (…) et crieront en chœur et de toutes leurs forces "Vive la France !" et chanteront La Marseillaise (…). On ne fraternisera pas avec l’ennemi."
Pour sa part, le colonel de Menditte relatera les événements du 11 novembre 1918 dans son carnet de notes journalières, de la manière suivante : "Le (canon de) 75 rageur a tiré régulièrement, montrant aux Boches que nous faisons bonne garde autour du régiment et, au jour, le feu recommence mais il est peu intense. Du reste, la situation est rectifiée à mon avantage. J’ai réorganisé mon front. Mes compagnies sont en liaison les unes avec les autres, mes hommes ont mangé chaud et je les ai ravitaillés en cartouches. Hier, cette opération avait dû être faite de jour mais pour les mitrailleuses seulement et dans des conditions effroyables, car le terrain était battu par les mitrailleuses ennemies. Cette fois, mes hommes ont tout ce qu’il faut pour tenir et ils tiendront. Vers 6 heures 30 circule le bruit de l’armistice. A 8 heures 30, l’avis est officiel. Pendant ce temps, on continue à tirer sur le front du régiment et les obus allemands tombent sur Dom-le-Mesnil. Je fais passer la bonne nouvelle au régiment et on attend ! 10 heures 45 : les obus tombent encore sur le village. 10 heures 57 : la mitrailleuse tire encore. 11 heures : un de mes clairons sonne "Cessez le feu", "Levez-vous" puis "Au drapeau". Les autres clairons répètent. La Marseillaise monte dans le lointain. Des cris de joie et les cris plus éloignés des Boches qui sortent de leurs trous et veulent fraterniser. Quelle joie et quelle émotion ! Ici, tout est en remue-ménage. On sort de l’église tous les lits boches qui s’y trouvent. Le père Guiton dit la messe et monte en chaire, mais à ce moment arrive le général Boichut qui ne reste que 10 minutes mais qui est suivi de trompettes d’artillerie et de cavalerie sonnant de joyeuses fanfares. La cérémonie continue, on chante le Te Deum et, ma foi, après cela on déjeune, avec quel appétit ! Aussitôt après déjeuner, le colonel Petitdemange arrive, il veut voir le régiment sur place et je l’accompagne sur la position. Il félicite les hommes, les officiers, et passe sur une grande partie du front car mon régiment n’a pas bougé et garde la place. Il fait un temps merveilleux. A mon retour, je trouve dans la rue le colonel Gizard qui rentre de permission. Il a perdu une bien belle matinée mais a gagné le calme d’une journée de dimanche qui fut bien angoissante pour moi (…). J’ai perdu 45 tués, 87 blessés et 12 disparus au cours de la journée d’hier. La proportion de tués est énorme pour de la guerre en rase campagne et prouve l’acharnement mis dans la lutte mais j’avais devant moi la Garde Prussienne : 4 régiments dont le 23e, le 357e et le 69e (…)."
Augustin Trébuchon, matricule 13002, recrutement de Mende, est né le 30 mai 1878 à Montchabrier.
Les combats ont effectivement continué jusqu’au dernier moment. Le soldat de 1ère classe Augustin Trébuchon, estafette de la 9e compagnie, titulaire de la Croix de guerre, est tué aux alentours de 10 heures 50 d’une balle dans la tête, alors qu’il est porteur d’un dernier message pour son capitaine. Il est considéré comme le dernier mort de la Première Guerre mondiale dans le secteur.
Il sera toutefois "officiellement" déclaré mort à Vrigne-Meuse le 10 novembre 1918 à 10 heures du matin.
Dans la poche de résistance tenue par le 415e R.I. au Nord de la Meuse, il revient au soldat Octave Delalucque d’avoir l’honneur de sonner le "cessez-le-feu", à 11 heures précises.
Appelé par le capitaine Lebreton, afin d’effectuer les sonneries réglementaires, le poilu, sans doute ému par la solennité de cette mission, ne se souvient plus de cette sonnerie. Ainsi avouera-t-il : "La dernière fois que je l’ai jouée, c’était en 1911, au champ de tir (…)."
Son nom ne s’incrira pas dans l’Histoire.
Pour l’occasion, il entonnera d’abord le refrain du régiment, ensuite les différentes sonneries demandées : "Cessez-le-feu", "Levez-vous", "Garde à vous" et enfin "Au drapeau". Les Allemands aussi sortirent de leurs tranchées…
Un profond silence s’étendra sur l’immensité du champ de bataille de la veille.
Un silence impressionnant.
Du côté allemand, l’Armistice fut accueilli comme une délivrance aux relents de défaite. Certains "Boches d’hier" cherchèrent à fraterniser avec les Français. Généralement sans grand succès.
Priés de rejoindre leurs lignes, chaque camp alla récupérer ses morts sur le terrain…
Le dernier communiqué officiel de la guerre, diffusé le 11 novembre à 15 heures, fait état de : "A l’Est de la forêt de Trellon, nous avons atteint la frontière belge. A la suite de durs combats, nous avons forcé les passages de la Meuse entre Vrigne et Lumes."
Officiellement, comme l’atteste les documents de l’époque ("L’état des officiers et hommes de troupe du 415e régiment d’infanterie tués à l’ennemi aux divers combats de 1914 à 1918"), annexé à l’historique du régiment, il n’y eut aucune perte humaine à déplorer le 11 novembre 1918 dans le secteur de Nouvion, Dom-le-Mesnil et Vrigne-Meuse.
Toutefois, les pertes subies, par les formations engagées par la 163e division dans l’opération de franchissement de la Meuse et de conquête d’une tête de pont, au cours des journées des 9, 10 et 11 novembre 1918, s’élevèrent à 96 tués et 198 blessés,... dont 68 tués et 97 blessés à porter au passif du seul 415e R.I.
Ces pertes sont à ajouter au nombre des pertes françaises, pour les derniers jours de la Grande Guerre.
Dans l’après-midi du 11 novembre, la population de Dom-le-Mesnil participa activement à la recherche des morts abandonnés sur le champ de bataille, au Nord de la Meuse (soldats du 415e R.I.).
Ces hommes furent dans un premier temps transportés à Dom-le-Mesnil, ensuite déplacés en l’église de Vrigne-Meuse.
Au soir de ce 11 novembre 1918, 33 corps, dont la majorité d’entre eux appartenait au 3e bataillon, furent alignés au coeur de l’église de Vrigne-Meuse.
Les pertes allemandes ne sont pas connues avec précision. Elles furent toutefois sévères, au regard de la rage au combat dont fit preuve l’Allemand en cette toute fin de guerre.
Dans l’historique du régiment des Fusiliers de la garde, le récit de la journée du 11 novembre se termine par ces mots : "Après-midi, la nouvelle de la révolution au pays, de l’abdication de SM l’Empereur, et de l’Armistice. Heureux ceux qui étaient tombés plein de foi dans la grandeur de la Patrie et qui ne vécurent pas là le plus noir de tous les jours ! Le soir de cette dernière bataille d’une guerre commencée quatre ans et demi plus tôt, avec tant de joie et d’espoir, vit le brave régiment des fusiliers de la garde réduit à 13 officiers, 25 sous-officiers et 100 hommes !"
Cette unité d’élite formait encore, la veille au soir, un bataillon de deux compagnies.
Ce groupe perdit environ la moitié de ses effectifs dans cette dernière opération.
Le 415e régiment d’infanterie eut à devoir demeurer dans la région de Dom-le-Mesnil durant quatre jours.
Au cours de la journée du 12 novembre, les hommes du régiment continuèrent à fouiller le secteur à la recherche des corps de soldats disparus au cours de l’ultime grand combat de la Première Guerre mondiale.
Alors que fixée dans la matinée du 13 novembre, la cérémonie d’inhumation des hommes du 415e R.I., tués lors des derniers combats, eut lieu sans que les éléments de la 415e ne puissent assister à cette cérémonie.
Ainsi, la 415e reçut l’ordre, dans la nuit du 12 au 13, de quitter Dom-le-Mesnil.
Dès le lendemain, à 7 heures du matin, vingt sapeurs furent désignés par le commandement pour creuser les tombes dans le cimetière de Vrigne-Meuse, où les derniers honneurs militaires furent rendus.
L’héroïsme du 415e régiment d’infanterie, au cours des derniers mois de la guerre fut récompensé par une citation à l’ordre de l’armée décernée par le maréchal Pétain, commandant en chef des armées de l’Est. Ainsi : "… Réengagé le 2 novembre, au-delà de l’Aisne débordé, sous les ordres du chef de bataillon de Menditte, et animé par lui de l’impérieuse volonté de vaincre, a franchi le canal des Ardennes, délivré neuf villages, capturé des canons, battu l’ennemi. Enfin, par un dernier et héroïque effort, jetant le 10 novembre ses bataillons sur la rive droite de la Meuse, sur une passerelle de fortune, battue par des mitrailleuses, a enlevé à deux divisions de la garde munies d’une puissante artillerie, les positions où elles se croyaient à l’abri de toute surprise. A brisé leurs contre-attaques et imposé à l’ennemi même, étonné de ses propres pertes, le respect de tels soldats."
En guise de conclusion…
Grâce à l’épais brouillard présent dans la vallée de la Meuse, aux canons du général Boichut, et à la ténacité des poilus et du cadre du 415e régiment d’infanterie, tout cela, dans le cadre d’un Armistice ratifié à 5 heures du matin par les Allemands, l’opération particulièrement osée et risquée de franchissement de la Meuse, a contribué à mettre un terme à la Grande Guerre.
Cet ultime épisode du conflit, côté français, au cours duquel sont morts pour la France et pour l’Armistice de trop nombreux soldats, méritait non seulement d’être connu, mais aussi de demeurer inscrite dans la mémoire collective.
L’épitaphe : "Le vrai tombeau des Morts, c’est le cœur des vivants" est gravée sur le monument de la 163e division au Signal de l’Épine…
Conditions météorologique le 11 novembre 1918
Les pressions barométriques sur la France sont fortes, entre 1025 et 1030 millibars.
Les températures sont relativement basses avec quelques gelées blanches.
A 7 heures du matin on relève : -1° C à Nantes et au Mans, 1° C à Limoges, 2° à Paris, 3° C à Clermont-Ferrand, 4° C à Bordeaux, 7° C à Brest, 9° C à Toulouse et 12° C à Marseille.
Voir également Augustin Trébuchon : ici